Réflexion sur la fin de vie…

Merci au webjournal du quartier de me permettre une expression libre sur une question d’actualité qui nous concerne tous…

En septembre 2022, pour la première fois depuis sa création, le Comité Consultatif National d’Ethique,  a décidé de transiger sur l’aide active à mourir. Dans une société libérale, ce sujet complexe et douloureux, ne trouve pas facilement un consensus. Tout le monde n’arrive pas à l’âge de la retraite quel que soit son ancienneté au travail.  Mais tout le monde aura une fin de vie, alors même qu’en 2060, un français sur sept deviendra centenaire (27 500 en 2021 selon l’INSEE).

Cette réalité était certainement dans la tête des bretons, 4 sur180 tirés au sort,  pour aller participer à la Convention Citoyenne chargée de donner son avis au gouvernement en place, le 02 avril de cette année. On ne peut pas rester étrangers à la réflexion sur la fin de vie, entamée en 2005 avec le vote d’une loi  actuellement en vigueur, mais plusieurs fois modifiée selon les moralités et usages locaux. Mis à part la volonté unanime de mourir sans souffrir,  les français s’en remettent béatement à leurs proches, sans désigner une personne de confiance, ni rédiger des directives anticipées. Devant cette carence, en février de l’année dernière, trois députés qui veulent aller plus loin que les soins palliatifs ont présenté un projet de loi sur l’aide active à mourir.

Conformément aux sondages et à ce qui se pratique en Oregon-USA , Canada, Suisse, Benelux, et récemment en Espagne, ils proposent de légaliser le suicide assisté et l’euthanasie.  Ce texte remplacerait la loi Claeys-Leonnetti inégalement appliquée Cf. les soins palliatifs, et surtout, elle permettrait de régulariser des situations juridiquement intenables maintenant en France Cf. l’affaire Vincent Lambert ! Force nous est de distinguer le malade incurable, de la personne âgée réduite à l’état de tube digestif déréglé…

Pour dépasser les soins palliatifs au profit d’une population vieillissante de plus en plus nombreuse, une société ne peut pas faire l’économie d’une réflexion en rapport avec les autres nations équivalentes. Une civilisation est jugée par l’Histoire sur la façon dont elle traite ses membres les plus « hors normes » : délinquants et mourants.  Ces derniers sont intarissables même hors pandémie du Covid ! Alors il faut savoir regarder la mort en face d’une façon holistique, c’est à dire globale, et de différents point de vue. Dans son deuil, la famille dont les héritiers du défunt,  se trouve aux premières loges d’un drame ordinaire, où évolue tout ce qui nous relie : le médical, sociétal, juridique, économique, etc . Nous devons les aborder au moment de concevoir la nouvelle règle de vie !

En la matière : la vie/la mort, les litotes ne manquent pas sous couvert de pudeur, tant de la part de l’Etat-Providence que de la multitude variée de ses commensaux !  Mais ce détour ampoulé du discours ne change en rien la hantise des grabataires, ni à l’attitude des soi-disant bienfaiteurs, à commencer par le corps médical.

Une démocratie sanitaire permet les dons d’organes, mais n’empêche pas d’aller un jour de vie à trépas. En bout de chaîne les thanatopracteurs rendent présentable un défunt apte à la résurrection un jour ? Nous pouvons croire au progrès de la médecine sans prendre l’option de sa capacité à recréer la vie, ni à évincer la mort.  Quoi qu’on en dise, le suicide assisté reste une façon de tuer. Il n’a rien à voir avec le suicide philosophique.

La nouvelle loi risque de ne concerner que le chapitre médical déjà bien encadré par la sédation profonde. Elle dit clairement qu’il ne peut pas y avoir d’acharnement thérapeutique. Le corps médical s’appuie sur son serment d’Hippocrate pour ne jamais administrer/atomiser la mort. Qui alors osera aller au delà ? Dans l’ordre juridique la parole est à la décence, plus qu’au Droit …

Qu’une loi prévienne mieux l’abus de faiblesse et mette de l’ordre dans le Fichier Central des Dispositions des Dernières Volontés, nul ne s’en plaindra. Mais dans le Code Civil, notre arsenal juridique laisse peu de place à une brusque innovation juridique hors ce qui concerne l’euthanasie, actuellement complètement interdite. L’occasion de la levée de cette interdiction permettrait de réformer les tutelles et les curatelles, toutes deux fort décriées, et de mettre la pression sur la généralisation du mandat de protection future !

La réforme du Droit et surtout de la fiscalité des successions, constituent un sujet presque autant délicat que l’adoption du suicide assisté : on fait facilement le rapport de l’un à l’autre. « Payez, je m’occupe des restes! » nous disent les acteurs de l’ordre économique. Qui n’a jamais été sollicité par son banquier pour souscrire un contrat d’obsèques ? Face aux prestataires de pompes funèbres, le législateur  cherche la quadrature du cercle.  La thanatopraxie à l’américaine n’a pas encore pris l’ampleur de celle qui sévit de l’autre côté de l’Atlantique. Pourtant nos cimetières +/- paysagés changent d’aspect.  Le nombre et la cupidité des professionnels qui se disent aptes à soulager la douleur de ceux qui restent et sont solvables ne cesse pas de s’accroître.

La dépendance et son corollaire le décès constituent un marché de 10Md € peu soumis aux fluctuations de la Bourse ! L’aspect humain et sociétal du sujet ne se prête à aucune classification.  Il montre sa dimension holistique sur un fond philosophique et moral. La démographie des nations qui ont adopté l’euthanasie est déclinante, mais ce n’est pas qu’une question sociétale. Les progrès de la médecine qui éloignent la douleur n’ont pas pour autant effacé la mort en fin de vie.  Après le « cure : soin médical » nos marchands de bien-être pourront encore proposer du « care : soin de bien-être » à celles et à ceux qui nient la décrépitude liée au vieillissement précédant la venue inéluctable de la camarde. Conclusion : Pour que le grabataire ne deviennent pas un indigent,  la société et les acteurs du monde économique ont une place à prendre et à tenir, sans état d’âme : prouesse ?

Le corps médical se trouve aux prises avec un savoir, un savoir faire et un savoir être encadrés par la loi mais… « Science sans conscience, n’est que ruine de l’âme! » dit-on , et cela me convient bien. Gageons que les participants à la Convention Citoyenne sauront donner un avis complet à notre gouvernement, sans verser dans l’enflure d’un parler entortillé et grotesque, raccourcissant un événement terriblement naturel à trois lettres : D.C.D.

Ainsi se termine ma réflexion sur l’aide médicalisée à mourir, sans connaître le point de vue des membres de la Convention Citoyenne.

Bien cordialement de Fernand

Le 19 mars 2023 .

3 réponses
  1. VAN DYCK Erik
    VAN DYCK Erik dit :

    Le sujet mérite toute notre attention vue l’âge de plus en plus âgé des anciens actuellement par rapport aux progrès de la médecine. Par rapport à ma lecture de votre texte, celui-ci mériterait une meilleure vulgarisation pour la bonne compréhension de tous. Cela devrait entraîner plus de réactions à ce problème de société pour une évolution positive !

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  2. Fernand MARECHAL
    Fernand MARECHAL dit :

    La vie est le sujet essentiel de l’existence. Il va de soi que son achèvement, quelles qu’en soient les circonstances, nous pose un problème d’importance. Le fait de vivre en société, nous oblige à encadrer tous les moments de son déroulement. Selon les civilisations on ne les vit pas de la même façon ici et là : même à l’échelle du quartier du Polygone à Lorient en 2023 : tolérance !
    Que l’Etat s’en préoccupe, ce n’est que normal et donc nécessaire, à condition ne nous laisser la liberté de conscience ?
    C’est pourquoi le suicide assisté et l’euthanasie ont autant une responsabilité morale que légale, comme tout ce qui touche à la vie !

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  3. Jean-Michel
    Jean-Michel dit :

    J’ai beaucoup apprécié le fait que tu proposes d’articuler la réflexion sur ce problème de la fin de vie autour d’une approche holistique qui impliquerait une prise de position philosophique. On ne peut traiter de quoique que soit qui a une Fin, sans tenir compte du fait que cette Chose ou Situation ou Statut a eu un commencement, un développement et un contexte. Ici en l’occurrence, le contexte est à la fois sociétal, civilisationnel, psychologique, sociologique et politique. La notion de fin de vie ne saurait être abordée raisonnablement sans l’inclure dans une réflexion sur ce que l’on appelle La Vie, en terme de Vivre ensemble dans une société organisée…Vivre ensemble du commencement à la fin de chacun de ses participants…

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